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5E pour former et apprendre : 4/ Explorer

Apprendre, c’est partir à la recherche de nouvelles significations, de liens. Comme tout explorateur, l’apprenant doit accepter – et se voir reconnaître – le risque de se tromper de chemin, d’aboutir à des impasses. De son côté, le concepteur de formation crée des environnements propices et sécurisants, dans lesquels les apprenants deviennent producteurs de savoirs.

Aucun « chemin d’apprentissage » ne peut être complètement tracé d’avance. Le concepteur s’efforce de créer l’environnement propice, mais seul l’apprenant sait, à posteriori, à quel moment, et par quel cheminement personnel, le « déclic » se fait.

Cette exploration ne saurait se limiter aux situations de formation « formelles ».

L’enquête menée par Morgan Mc Call et ses collègues du « Centre de Leadership Créatif » (CCL), à partir des années 60, auprès de managers anglo-saxons, a établi que ces managers répartissaient comme suit l’acquisition de leurs compétences professionnelles :

Cette enquête n’a pas valeur de recherche scientifique. Elle ne dit pas que la formation « formelle » est de peu d’utilité. Comme Charles Jennings lui-même, l’un des promoteurs du modèle, dans la réponse qu’il fait à une critique :

« Poser le 70-20-10 comme une règle est « à côté de la plaque ».

Il s’agit de poser un cadre pour aligner la stratégie de développement avec le « monde réel », il ne s’agit pas de nombres ».


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Il ne s’agit donc pas d’utiliser les proportions « 70-20-10 » comme dans une recette de cuisine, mais de situer la formation formelle dans une perspective systémique. La situation d’apprentissage formel est celle dont l’intention et les objectifs ont été déterminés par l’institution (école, entreprise). À l’opposé se trouvent les apprentissages informels, dont l’initiative appartient à l’apprenant. Entre les deux existent plusieurs nuances, voir à ce sujet « Apprentissages formels et informels, de quoi parle-t-on ? »

D’une certaine manière, on pourrait dire que la formation formelle « sécurise l’exploration. Elle aménage la « bonne hauteur de marche » de progression d’un niveau de difficulté à l’autre, dans le respect de la « zone proximale de développement ». Elle réserve du temps disponible. Elle prévoit le temps nécessaire à l’appropriation, à la prise de conscience des apprentissages et à la projection de leur transposition. Elle donne le droit à l’erreur.  Beaucoup d’éléments que la « vraie vie » ne permet pas facilement. En cela, la formation formelle facilite la transférabilité des savoir-faire, et permet, justement, de mieux apprendre de l’expérience et des échanges.

 

Application :

De plus en plus, une porosité s’établit entre « formel » « social » et « expérientiel », le dispositif formel lui-même intégrant la dynamique des apprentissages sociaux et des allers-retours entre situations de travail et de formation. Voir à ce sujet « Social learning, apprentissage social, de quoi parle-t’on ?« , « Créer des communautés d’apprenants, oui mais pour quoi ?« .

 

Les situations de travail réelles s’intègrent au dispositif de formation comme l’explique ce retour d’expérience des Digital Learning Excellence Awards.

 

L’apport de la psychologie

Le psychologue Albert Bandura souligne le rôle des relations sociales dans les apprentissages.

« Les apprentissages par expérience directe surviennent en fait le plus souvent sur une base vicariante, c’est à dire en observant le comportement des autres et les conséquences qui en résultent pour eux. L’apprentissage vicariant ne dispense certes pas dans tous les cas de l’expérience directe, mais il permet le cas échéant de la faciliter et incite à s’y investir si les conséquences observées sont positives.
Le fait de pouvoir apprendre par observation rend en effet les individus capables d’acquérir des comportements ou des savoir-faire sans avoir à les élaborer graduellement par un processus d’essais et d’erreurs affirme Bandura ».

Source :  Michel Monot, repris par Paul Desette

 

Au-delà du triptyque « formel-social-travail », le design de « solutions apprenantes » se rapproche aujourd’hui de celui de la création d’environnements propices à la créativité et à l’innovation. Les lieux d’apprentissage changent. Les professionnels d’aujourd’hui et de demain auront forcément à prendre des décisions dans un environnement complexe et mouvant – les procédures simples et répétitives étant confiées aux machines. Le temps d’apprentissage devient donc de moins en moins un temps de « conditionnement » à des savoirs procéduraux. Et de plus en plus un temps où l’on se réunit pour résoudre des problèmes en sortant du cadre. L’intuition se trouve valorisée.

Il s’agit donc plus que jamais pour notre apprenant explorateur de sortir des sentiers battus …