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Formation et propriété intellectuelle

Bien souvent, le concepteur de formation fait un travail de synthèse. Il recherche des informations, les vérifie, les organise pour faciliter la compréhension et la mémorisation des participants. Il utilise donc de l’information produite par d’autres, en y ajoutant ses propres apports, grilles de lecture, visuels… Quelles sont les règles de propriété intellectuelle qu’il doit respecter en faisant ce travail ?

En France, la protection d’une oeuvre ne requiert aucune procédure de dépôt de la part de l’auteur (contrairement aux Etats-Unis, où une formalité doit être accomplie pour obtenir le  » copyright »).

L’article L. 111-1 du Code de la propriété intellectuelle dispose ainsi : « l’auteur d’une oeuvre de l’esprit jouit sur cette oeuvre, du seul fait de sa création, d’un droit de propriété incorporelle exclusif et opposable à tous. Ce droit comporte des attributs d’ordre intellectuel et moral, ainsi que des attributs d’ordre patrimonial […] ».

Et l’article L 123-1 précise la durée de vie de ce droit de propriété intellectuelle :  » L’auteur jouit, sa vie durant du droit exclusif d’exploiter son oeuvre sous quelque forme que ce soit et d’en tirer un profit pécuniaire. Au décès de l’auteur, ce droit persiste au bénéfice de ses ayants-droits pendant l’année civile en cours et les soixante-dix années qui suivent ». A noter que le droit moral de l’auteur, bien décrit dans l’article de Wikipedia sur le sujet, est lui imprescriptible.

Par conséquent, si l’on souhaite utiliser un extrait d’une oeuvre, il convient d’obtenir de la part de son auteur l’autorisation de le faire, éventuellement contre rémunération.

En revanche, la courte citation est possible et autorisée par le législateur, dans l’article  L122-5 du Code de la propriété intellectuelle, sous certaines conditions. Voici celles qui concernent plus particulièrement les formateurs :

  1. Les analyses et courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information de l’oeuvre à laquelle elles sont incorporées ;
  2. Les revues de presse ;
  3. La représentation ou la reproduction d’extraits d’œuvres, sous réserve des œuvres conçues à des fins pédagogiques, des partitions de musique et des œuvres réalisées pour une édition numérique de l’écrit, à des fins exclusives d’illustration dans le cadre de l’enseignement et de la recherche, à l’exclusion de toute activité ludique ou récréative, dès lors que le public auquel cette représentation ou cette reproduction est destinée est composé majoritairement d’élèves, d’étudiants, d’enseignants ou de chercheurs directement concernés, que l’utilisation de cette représentation ou cette reproduction ne donne lieu à aucune exploitation commerciale et qu’elle est compensée par une rémunération négociée sur une base forfaitaire sans préjudice de la cession du droit de reproduction par reprographie mentionnée à l’article L. 122-10 ;

Concernant la citation, donc, il faut qu’elle soit incorporée à d’autres développements, par exemple au support de formation destiné aux participants. La notion de « courte citation » est relative à la longueur de l’œuvre dont elle est extraite (une citation de 10 lignes aura plus de chances d’être considérée comme courte si elle est issue d’une œuvre de 500 pages que si elle est issue d’un texte d’une page).

La citation doit être effectuée sans  modifier le texte cité, et en mentionnant les sources (nom de l’auteur, références…).

Ce n’est pas parce qu’une ressource est gratuite et en accès libre qu’elle n’est pas protégée

Tout ce que l’on vient d’écrire s’applique aux ressources que l’on trouve librement sur internet, textes, images, vidéos…L’autorisation de l’auteur doit systématiquement être sollicitée, ses droits patrimoniaux et moraux sur l’oeuvre sont protégés par les mêmes textes. Le  défaut d’autorisation  expose au risque d’une condamnation pour contrefaçon pouvant aboutir à trois ans d’emprisonnement et à 300 000 € d’amende.Voir à ce sujet l’article de Maître Muriel-Isabelle CAHEN.

Si l’on souhaite illustrer une documentation de formation, par exemple, il convient de respecter les droits attachés aux illustrations que l’on trouve. Il est possible de trouver des photos libre de droit sur internet, mais il convient d’identifier le niveau d’autorisation conféré à l’utilisateur. Ainsi, le site Photo libre indique que « Ces photos sont totalement gratuites et libres de droit, toutefois elles ne peuvent être revendues ou utilisées dans un quelconque support à des fins commerciales » et demande de faire apparaître un lien internet sous la photo.  On peut également acheter des photos pour les insérer dans les supports.

Des cadres qui permettent de partager et co-concevoir

Oui, mais les formateurs savent bien que l’on est plus intelligent et créatif dans l’échange, la co-conception. On le voit bien dans le monde de la formation initiale, avec les sites comme Sésamath, qui permet de mettre en commun et de créer des ressources pour l’enseignement des mathématiques.

On peut ainsi trouver sur internet des  Ressources éducatives libres, « matériaux digitalisés offerts librement pour que des éducateurs, des étudiants et des apprenants les réutilisent pour l’enseignement, l’apprentissage et la recherche » (définition UNESCO).

Plus de 500 sites francophones publient ainsi des ressources éducatives libres sous licence Creative Commons.

Creative commons propose des contrats de droit d’auteur, permettant de diffuser des ressources sur internet avec différents niveaux d’autorisation. L’auteur peut ainsi demander (ou non) d’apparaître comme auteur de la ressource, autoriser (ou non) l’utilisation à des fins commerciales, la modification de l’oeuvre… Tout cela très bien expliqué dans des films d’animation et des bandes dessinées.

Wikipedia est un une encyclopédie libre dont le contenu, en dehors des citations qui y figurent, est soumis à une « Licence Creative Commons». C’est une licence de partage libre qui permet à toute personne de reproduire, distribuer et communiquer au public une œuvre réalisée sur ce site, ainsi que de la modifier. Donc les articles de Wikipedia sont utilisables et modifiables librement, mais sous réserve de respecter deux conditions :

Un grand merci à Mayeul GAUBERT, juriste vigilant et pédagogue à Cegos, dont les apports ont été très précieux à la rédaction de ce billet.