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Etes vous un formateur « behavioriste »?

Behaviorisme, constructivisme, connectivisme… les théories sur l’apprentissage se succèdent. Chacune d’elle se focalise sur un objet particulier : comportement observable, processus interne d’apprentissage, liens en jeu dans l’apprentissage…

Nous autres formateurs sommes plus ou moins conscients de nos représentations sur ce qu’est apprendre. Et pourtant, elles sont déterminantes dans nos façons de former. C’est pourquoi j’entreprends cette série de billets, qui a pour but de mettre en regard les grandes théories des apprentissages et la pratique du formateur. Commençons donc par le behaviorisme.

Le behaviorisme : une théorie du conditionnement

La théorie behavioriste considère le comportement observable d’un sujet qui apprend.

Tout commence avec Pavlov, et son expérimentation sur un chien. L’animal est soumis à un stimulus inconditionnel (une appétissante boulette de viande, qui déclenche sa salivation). Lorsque l’expérimentateur lui présente la boulette, il active  simultanément le son d’un métronome (stimulus conditionnel). Après de nombreuses répétitions, le son (stimulus conditionnel) déclenche à lui tout seul la salivation (réponse en terme de comportement observable). L’expérimentateur a donc opéré un conditionnement, dont Skinner montrera qu’il est plus efficace si le couplage stimulus-réponse est suivi d’une récompense : le renforcement positif.

A ceux qui trouveraient déplacés de comparer l’apprenant à un chien salivant à l’audition d’un métronome, rappelons que la théorie développée par Skinner va bien au-delà. Pour Skinner, le sujet n’est pas  passif, car il vise à « obtenir une modification de l’environnement qui aille dans le sens attendu (2- source en bas de billet )».
« Ce qui est conditionné, c’est un comportement volontaire émis pour atteindre un certain but (2)».
Sa motivation à agir (le drive) est « déclenchée par un déséquilibre interne de l’organisme (1)», qui peut être physiologique au départ, puis évoluer vers des niveaux « supérieurs » de besoins, cognitifs ou sociaux.

Tous les motifs d’action, et donc tout apprentissage, fonctionneraient donc selon la séquence :

 besoin –>drive –> action.

Les stimuli à l’origine du « besoin » peuvent être internes (le besoin d’apprendre) ou externes (un dispositif de formation particulièrement attrayant).

Applications pratiques du behaviorisme pour la formation

La première application pratique de la théorie de Skinner a été l’enseignement programmé linéaire, qui repose sur la méthode suivante :

Skinner considère en effet que l’erreur est néfaste pour apprendre. Au terme du cours, 90% des apprenants doivent produire les bonnes réponses, sinon c’est que le cours a été mal conçu.
Le cours est linéaire dans la mesure où il faut s’assurer d’obtenir les réponses justes avant de passer à la partie suivante du cours.

Crowder proposera l’enseignement programmé ramifié. A l’inverse de Skinner, il considère en effet que « l’erreur peut être bénéfique si l’apprenant est immédiatement informé de celle-ci (importance du feed back), s’il en connaît les causes et peut la corriger » (2).
Sa méthode d’enseignement intègre donc les QCM : chaque séquence est suivie d’une série de questions, généralement une bonne réponse et trois mauvaises. Les réponses renvoie l’apprenant sur un corrigé explicatif.

Que faites-vous si vous êtes un formateur « behavioriste » ?

Si vous êtes imprégné de behaviorisme :

Faisons un pari : nous sommes tous un peu behavioristes.

Cette théorie, formulée par Skinner dans les années 50 du siècle précédent, a été critiquée, parce qu’elle fait l’impasse sur « la boîte noire », sur la façon dont les apprentissages se construisent effectivement au sein de la personne ou du groupe. « Tout apprentissage est ainsi : ce qui le constitue est irréductible aux descriptions comportementales qui peuvent en être faites », écrit Meirieu.
Et bien sûr, il y a des pratiques issues du behaviorisme – ou d’une mauvaise compréhension de celui-ci- qui peuvent être contre-productives, comme :

D’où l’intérêt d’identifier la théorie sous-jacente à nos différentes décisions en formation, d’en avoir une approche distanciée et critique, afin d’utiliser dans chaque cas la théorie qui nous amènera à considérer ce qu’il faut regarder dans la situation donnée, et à proposer une solution adaptée.

Lire aussi : Etes-vous un formateur constructiviste

Sources:
(1) Traité des Sciences et des techniques de formation. Sous la direction de P. Carré et P. Caspar. Dunod
(2) Pédagogie: dictionnaire des concepts clés. F. Reynal, A. Rieunier
(3) Apprendre… oui mais comment P. Meirieu, ESF