Tuto Réforme #8 : les ajustements de l’ordonnance « coquilles »

Par le 10 septembre 2019

L’ordonnance « coquilles » vient modifier certaines dispositions de la Loi Avenir, notamment en matière de ProA, de portabilité du DIF, de conditions de déclenchement de l’abondement correctif.

Qu’est-ce qu’une ordonnance ?

Une ordonnance est une mesure prise par le Gouvernement dans des domaines juridiques relevant normalement de la loi et donc du Parlement. Le Gouvernement ne peut prendre des ordonnances que s’il y a été habilité par le Parlement, et la Loi Avenir prévoyait en effet la publication de cette ordonnance. Les ordonnances entrent en vigueur dès leur publication au Journal Officiel. L’ordonnance dont nous allons parler est donc entrée en vigueur le 22 août 2019.

Les principales dispositions de l’ordonnance « coquilles »

Et d’abord, les dispositions relatives au CPF et au projet de transition professionnelle.

Chacun peut conserver le bénéfice de son compteur « DIF »

Souvenez-vous : la loi de 2014, qui créait le CPF, prévoyait l’extinction des heures de DIF au 31-12-2020. Mais l’ordonnance dispose que les heures de formation acquises au titre du DIF, donc avant le 31-12-2014, ne seront pas perdues. Elles sont converties en euros et pourront être utilisées au titre du CPF sans « date de péremption ». Attention cependant, il y a une condition : les heures de DIF doivent avoir été reportées par le bénéficiaire sur son compte CPF avant le 31-12-2020.

Les euros issus des heures de DIF entrent dans le plafond du compteur CPF

Il y a donc en quelque sorte « fusion » du DIF et du CPF. Le texte en tire la connaissance, en intégrant la somme issue de la monétisation des heures de DIF dans le plafond du compteur CPF : maximum 5000€, 8000€ pour les personnes qui n’ont pas validé un premier niveau de certification professionnelle, ou en situation de handicap.

Les demandeurs d’emploi peuvent mobiliser leur CPF pour toute action éligible au CPF – et plus seulement pour les actions financées par les régions ou Pôle Emploi.

Le CPF de transition professionnelle – qui a remplacé le congé individuel de formation – est étendu aux intermittents et aux intérimaires

L’état des lieux réalisé lors de l’entretien professionnel.

Nous en avons parlé lors des tutos n°1 et 2. C’est une question qui préoccupe nombre d’entre vous, car, pour les entreprises de plus de 50 salariés, elle est liée aux conditions de déclenchement de l’abondement correctif.

L’ordonnance « coquilles » instaure une période transitoire, qui s’achèvera le 31-12-2020.

Pendant l’année 2020, jusqu’au 31 décembre, l’employeur pourra choisir entre deux manières de justifier du respect de ses obligations.

  1. Il peut directement appliquer les dispositions de la Loi Avenir, c’est-à-dire montrer que le salarié a bénéficié de ses trois entretiens et qu’il a suivi au moins une formation non obligatoire en vertu d’un texte (je vous renvoie aux tutos n°1 et 2)
  2. Il peut choisir de rester sur les dispositions précédentes, à savoir justifier que le salarié a bien
    1. Bénéficié des 3 entretiens
    1. Et de 2 sur 3 des mesures suivantes
      1. Accès à la formation
      1. Accès à la certification, même partielle
      1. Augmentation ou promotion

Attention, à partir du 1/01/2021 ce sont les dispositions de la Loi Avenir qui s’appliquent.

Le dispositif Pro-A évolue également

Son objet permet une promotion ou une reconversion professionnelle. Le dispositif est assoupli, sans doute suite au constat de son mauvais démarrage en 2019.

La VAE devient éligible à la Pro-A. Et, point majeur pour les entreprises qui souhaitent accompagner la montée en compétences de leurs salariés peu qualifiés, l’acquisition du socle de connaissances et de compétences – et donc la certification CLEA – est désormais éligible à la Pro-A.

Les OPCO pourront prendre en charge la rémunération des salariés en Pro-A (un décret est à paraître à ce sujet). Le dispositif devient accessible aux salariés en activité partielle (ce que l’on appelle couramment le chômage partiel).

On se souvient que selon la Loi Avenir la Pro-A n’était mobilisable que pour des formations qualifiantes, donc inscrites au RNCP. L’ordonnance « coquilles » prévoit que les branches pourront par accord, mais uniquement sur des métiers en fortes mutations, définir des certifications professionnelles éligibles à la Pro-A.

Enfin, des mesures sur l’apprentissage

  • Les apprentis dont le contrat est rompu peuvent poursuivre leur formation pendant 6 mois sans employeur. Ils ont alors le statut de stagiaire de la formation professionnelle.
  • La durée du contrat d’apprentissage peut être adaptée et être supérieure à celle du cycle de formation
  • Il est bien précisé que le contrat d’apprentissage fait l’objet d’une simple transmission à l’opco

Les CFA internes aux entreprises n’ont pas l’obligation de préciser l’activité de formation en apprentissage dans leurs statuts.

Au total, des rectificatifs qui ont pour objet de simplifier la mise en œuvre de la réforme par les acteurs.

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Luc Il y a 4 années

Bonjour Madame BOURDAT,
J’ai une question concernant les contrats d’apprentissage.
Certains Centres de formation demandent aux entreprises un complément au coût contrat France Compétences.
Est-ce une pratique normale ?
Est-ce à l’entreprise de prendre en charge ce coût (alors que nous payons déjà une CUFPA qui contient la TA) ?
Merci d’avance pour votre réponse.

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    Mathilde Bourdat

    Mathilde Bourdat Il y a 4 années

    @Luc Rien ne l’interdit. Il se peut que le montant pris en charge par l’OPCO, financé grâce à la CUPFA, excède les coûts de la formation pour l’organisme. Par exemple, si la formation nécessite de gros investissements en équipements, ou encore dans l’enseignement supérieur. Dans ce cas, le CFA peut très bien vous demander un financement complémentaire.

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MARINA Il y a 4 années

Bonjour Mme Bourdat
si l’on part sur l’application de l’ordonnance coquille, avec entretien possible jusqu’au 31/12/2020
à quel moment l’employeur doit déclarer les abondements correctifs ? et sous quelle manière ?
Merci d’avance pour l’étude de ma question, très cdlt

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SEVERINE BACHELET Il y a 5 années

Bonjour
si l’entreprise choisi de justifier de son obligation en appliquant la regle issue de la loi du 5 septembre 2018, pouvez confirmer que sur le document qui va servir de bilan, il n’est pas néssaire de faire référence à la certification et à la progression professionnelle. merci

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    Mathilde Bourdat

    Mathilde Bourdat Il y a 5 années

    @Séverine Bachelet Non, le bilan doit toujours mentionner tout ce qui s’est passé du point de vue du parcours du salarié au cours des 6 dernières années : entretiens pro réalisés, accès à la formation (obligatoire ou non), accès à la certification, évolution salariale et/ou promotion.
    Ce sont les conditions de déclenchement de l’abondement correctif qui diffèrent selon le choix de l’employeur, pour 2020 uniquement

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Isabelle Il y a 5 années

Bonjour Mathilde , Au regard de l’ordonnance coquille peut-on considerer que la date butoir pour la 3 -ème série d’entretien passe de mars 2020 à décembre 2020 compte tenu de la période transitoire mentionnée.

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    Mathilde Bourdat

    Mathilde Bourdat Il y a 5 années

    @Isabelle Oui, tout à fait, date butoir prorogée au 31/12/20

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HEXAFORMATION Il y a 5 années

Merci Mathilde.
Je suis d’accord avec vous, ces correctifs vont dans le bon sens et simplifieront les choses notamment en termes de bilan d’étape à 6 ans.

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Natalie Il y a 5 années

bonjour
la phrase » Les demandeurs d’emploi peuvent mobiliser leur CPF pour toute action éligible au CPF – et plus seulement pour les actions financées par les régions ou Pôle Emploi. » laissent penser que les formations de la Région ou de PE sont toujours finançables par le CPF ; or l’article 1, 53° supprime cette possibilité.
L’article L. 6323-21 est remplacé par les dispositions suivantes :
« Art. L. 6323-21.-Les formations éligibles au compte personnel de formation sont, pour les demandeurs d’emploi, les formations mentionnées à l’article L. 6323-6. » ;
bravo en tous cas pour ce blog que je ne me lasse pas de consulter car j’y trouve une expertise rare et pointue (merci Mathilde!)

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Cécile Il y a 5 années

Bonjour,

Merci pour ce décryptage très clair.
Concernant l’état des lieux réalisé lors de l’entretien professionnel, si l’entreprise décide d’appliquer les dispositions de la Loi Avenir en 2020, est-ce que cela signifie qu’il n’y a pas nécessité de fournir le statut des dispositions précédentes (justification de 2 des 3 mesures)?

Merci par avance.

Répondre
    Mathilde Bourdat

    Mathilde Bourdat Il y a 5 années

    @Cécile Lors de l’entretien « bilan », celui qui a lieu une fois tous les 6 ans, vous faites le bilan de tout ce qui s’est passé pour le salarié au cours des six dernières années sur les points suivants : formations suivies, augmentations ou promotions, accès à la certification. Ce bilan est formalisé dans le document remis au salarié.
    Pour juger si vous devez procéder à l’abondement correctif ou non (si votre entreprise a plus de 50 salariés), vous pouvez effectivement choisir d’appliquer la loi Avenir : entretiens et au moins une formation non obligatoire. Jusqu’au 31-12-2020, vous pouvez également choisir de rester sur les critères précédents : les 3 entretiens + 2 sur 3 de « Augmentation- Promotion »/ « Certification »/ Accès à la formation (obligatoire ou non).

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