Ce billet a été modifié le 30-10-2018 suite à la nouvelle rédaction des articles L 6315-1 et L 6321-2 du Code du travail au 1/01/2019
Responsables RH ou formation, vous êtes-vous préparés pour le bilan à 6 ans ? Celui qui, à l’article L 6323-13, prévoit que tous les 6 ans, l’entretien professionnel, dit « entretien de bilan », fait le récapitulatif de la période écoulée.
Avant l’entrée en vigueur de la loi Avenir, l’entretien de bilan permet de vérifier qu’au cours de cette période, le salarié doit avoir bénéficié d’au moins trois entretiens professionnels et d’au moins deux sur trois des mesures suivantes :
- accès à la formation
- augmentation ou promotion
- accès à la certification, même partielle.
A défaut, l’employeur doit déclarer la situation à l’OPCA, et procéder à un abondement correctif du CPF. Cet abondement est de 100 heures pour les salariés à temps plein, et 130 heures pour les salariés à temps partiel. Chaque heure ainsi abondée est valorisée à 30€, soit une somme de 3000 à 3900€ à verser à l’OPCA.
Quelles sont les modifications introduites par la loi Avenir ?
La teneur de chaque entretien professionnel est modifiée
La version de l’article L6315-1 à venir au 1er janvier 2019 maintient l’objet de l’entretien : il est consacré aux « perspectives d’évolution professionnelle » du salarié, « notamment en terme de qualifications et d’emploi ». Il « ne porte pas sur l’évaluation du travail du salarié ».
Cependant, en plus des informations sur la validation des acquis de l’expérience, déjà prévues dans la version en cours du texte, la personne qui réalise l’entretien devra également communiquer au salarié des informations sur :
- l’activation par le salarié de son CPF
- les abondements de ce compte que l’employeur est susceptible de financer
- le conseil en évolution professionnelle
Les points à vérifier lors du bilan à 6 ans sont inchangés.
La rédaction à venir au 1-01-2019 de l’article L6315-1 maintient l’état des lieux récapitulatif du parcours professionnel du salarié.
Il s’agit toujours de « vérifier que le salarié a bénéficié au cours des six dernières années des entretiens professionnels prévus au I et d’apprécier s’il a :
1° Suivi au moins une action de formation ;
2° Acquis des éléments de certification par la formation ou par une validation des acquis de son expérience ;
3° Bénéficié d’une progression salariale ou professionnelle.
Mais les conditions de déclenchement de l’abondement correctif sont modifiées
« Dans les entreprises d’au moins cinquante salariés, lorsque, au cours de ces six années, le salarié n’a pas bénéficié des entretiens prévus et d’au moins une formation autre que celle mentionnée à l’article L. 6321-2, son compte personnel est abondé dans les conditions définies à l’article L. 6323-13″.(Rédaction à venir au 1-01-2019 de l’article L6315-1).
Il n’y a donc plus que deux conditions :
- les trois entretiens professionnels
- et le fait d’avoir bénéficié d’une formation autre que celle mentionnée à l’article L6321-2, c’est à dire « d’une action de formation qui conditionne l’exercice d’une activité ou d’une fonction, en application d’une convention internationale ou de dispositions légales et règlementaires ».
Le champ des formations obligatoirement réalisées sur temps de travail se trouve par ailleurs réduit par cet article à ces seules actions.
Dès lors, on peut considérer à contrario que toute formation qui n’est pas strictement obligatoire pour exercer l’activité (un permis spécifique, une formation à la sécurité, ou encore résultant d’une directive sur la distribution à l’assurance; etc …) peut être prise en compte dans le bilan à 6 ans.
Cette interprétation est beaucoup plus restrictive que celle qui consistait à retenir la définition de la formation obligatoire donnée par le Ministère de l’économie et des finances, résultant des 2 premiers alinéas de l’article L 6321-1 du Code du Travail et d’une jurisprudence constante. Cette définition revient à considérer comme obligatoires les actions appartenant à l’ancienne « catégorie 1 » du plan :
- actions d’adaptation au poste de travail
- actions d’ anticipation des évolutions de l’emploi
Cette interprétation restrictive, fondée sur la rédaction à venir de L 6321-2 « action de formation qui conditionne l’exercice d’une activité (…) » prime actuellement chez les commentateurs.
On lira avec intérêt, à ce sujet la Chronique de JP Wilhems dans New Tank RH « La créance du salarié sur l’entreprise qui ne respecte pas ses obligations de formation » (25 octobre 2018- Analyse n° 132082).
La traçabilité des actions de formation organisées pour chaque salarié doit donc se déplacer.
Aux anciennes catégorie 1 et 2 se substituent un suivi des actions qui conditionnent l’accès à l’emploi, réalisées en application de textes, d’une part, et un suivi de toutes les autres actions, d’autre part.
Reste, comme l’indique JP Wilhems dans sa chronique pré-citée, que l’abondement automatique du CPF s’exprimera désormais en euros, et sera directement destinée à l’alimentation du compte du salarié concerné par le manquement de l’employeur à son obligation. D’où, peut-être, un renforcement à attendre de la vigilance des salariés et de leurs représentants sur cette question.
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Flavie Il y a 3 années
Bonjour Mathilde
Pouvez-vous me dire si le fait de ne pas avoir eu d’entretien professionnel au bout de deux d’ancienneté est normal? A noter que j’ai eu une formation obligatoire proposé par l’employeur.
Merci par avance pour votre retour
Thoma Il y a 3 années
Bonjour, mon employeur nous impose les formations CACES, sans celui ci il refuse de signer notre autorisation de conduite. La conduite des chariots fait partie de mon poste. Est ce que mon employeur peut utiliser cette formation pour cocher la case des formations non obligatoire du bilan des 6ans dans ce contexte?
Luc Il y a 4 années
Bonjour Mathilde,
Concernant le bilan à 6 ans et notamment les formations, la loi de 2014 ne mentionnait pas la notion de Formation obligatoire.
Cette notion est apparue en 2019 apparemment. Peut-on donc, ne prendre en compte les formations obligatoires qu’à partir de 2019 (et de 2014 à 2019, prendre en compte l’ensemble des formations) ?
Mathilde Bourdat Il y a 4 années
@Luc Oui, jusqu’au 31-12-2020 vous pouvez vérifier si vous devez payer l’abondement correctif en choisissant entre l’une et l’autre de ces solutions :
1- 3 entretiens pro en 6 ans + au moins une formation non obligatoire
2- 3 entretiens pro en 6 ans + 2 mesures sur 3 parmi les suivantes : Accès à la formation (n’importe laquelle)/ Accès même partiel à la certification/ Augmentation ou promotion
ADORNI CARINE Il y a 4 années
la formation caces fait elle partie des formations obligatoires, dans la mesure ou nos chariots ne sont utilisés que dans nos locaux. La carsat fait une recommandation de passer le caces, mais ne l’impose pas. Par contre si nous faisons les autorisations de conduite, le caces n’étant pas obligatoire pour tenir le poste, puis je prendre en compte les formations caces dans le bilan à 6 ans ?
Mathilde Bourdat Il y a 4 années
@Adorni Carine Il est préférable de laisser le responsable sécurité ou la direction de votre entreprise prendre cette décision. En effet, en cas d’accident, les formations suivies par les salariés seront examinées, et c’est eux qui porteront la responsabilité d’une éventuelle carence.
S’ils sont d’accord pour estimer que la formation conduisant au CACES n’est pas obligatoire en vertu d’un texte, vous pourrez effectivement prendre cette formation en compte pour dédouaner l’entreprise de l’abondement correctif
Nanou Il y a 5 années
Bonjour je suis auxiliaire vétérinaire depuis 2007, mes patrons nous obligent à faire deux formations par an, si elles ne sont pas faites elles sont déduies de notre prime de fin d’année soit deux cent euros par formations. or il se trouve qu’il n’y a pas tout le temps des formations proche et interessante vers chez nous car loin des grandes villes.Sommes nous obligés de faire les formations et ont ils le droit de nous faire du chantage par rapport à la prime.
Mathilde Bourdat Il y a 5 années
@Nanou Cette réduction de prime me semble illicite : vous trouverez ici plus d’explications sur les sanctions pécuniaires prohibées (chapitre « primes ») https://rfsocial.grouperf.com/article/0062/ra/rfsocira0062_0900_7724D.html
Renaud Il y a 5 années
Bonjour, pouvez vous me confirmer que votre lecture est donc bien celle-ci : on peut considérer à contrario que toute formation qui n’est pas strictement obligatoire pour exercer l’activité (un permis spécifique, une formation à la sécurité, ou encore résultant d’une directive sur la distribution à l’assurance; etc …) peut être prise en compte dans le bilan à 6 ans.
Devoir faire autre chose que l’ex catégorie 1 n’a aucun sens. Cela obligerait toutes les entreprises à faire pour l’ensemble de leurs salariés des formations qui n’ont rien à voir avec leur poste…ce qui est ridicule
Mathilde Bourdat Il y a 5 années
@Renaud Du point de vue de l’abondement correctif, oui, c’est ce que dit le texte. Mais le bilan à 6 ans c’est autre chose (voir le tuto #1). Lors du bilan à 6 ans, on fait le vrai bilan de tout ce qui s’est passé au cours des 6 années précédentes : accès à la certification, à la formation, augmentations ou promotion … Et si en 6 ans il n’y a eu que des formations strictement obligatoires au titre d’un texte, le risque n’est pas l’abondement correctif, mais le contentieux. L’employeur garde l’obligation d’adapter le salarié à son poste de travail et de veiller à son maintien dans l’emploi et à sa capacité d’occuper un emploi.
Subra Il y a 5 années
Bonjour,
pouvez- vous nous indiquer si le bilan à 6 ans peut être anticipé et organisé dès 2019 ?
Hadrot Il y a 5 années
Bonjour ,
Je travaille dans une entreprise dépendant de la convention de la métallurgie de saone et Loire et nous sommes 80 salariés.
Ce jour notre responsable nous a informé des nouvelles dispositions de formation :
Soit Formation obligatoire par rapport à notre métier et ce : une par an pendant 6 ans .
La formation Sera choisie par notre responsable Exemple Formation Excel , tout en nous demandant notre choix pour la forme .
Car il ne veut pas de demandes différentes compte tenu du coût élevé.
Est ce légal l’obligation tous les ans ?
Peut il m’imposer une formation ?
Merci bien
Mathilde Bourdat Il y a 5 années
@Hadrot L’explication qui vous a été donnée n’est pas la bonne. Tous les 6 ans (et non tous les ans) l’employeur est tenu de vous donner accès à une formation qui ne résulte pas d’une obligation légale pour la tenue de votre poste. Au titre du plan de formation, votre employeur peut vous imposer une formation, car celle ci relève de son pouvoir de direction. Mais il est vrai qu’une formation imposée, qui ne correspondrait pas à un besoin que vous ressentez, risque de n’être guère efficace …
Camille Bodinier Il y a 5 années
Bonjour Mathilde,
Merci à vous pour cet article très intéressant.
J’avais eu le plaisir de vous rencontrer en 2015, lorsque j’avais suivi une formation de la CEGOS que vous animiez.
J’ai une petite interrogation: j’ai bien compris que l’obligation de formation des entreprises excluait dorénavant les formations obligatoires/réglementaires. Mais le terme lui n’est pas repoussé? Nous avons toujours que jusqu’en 2020 pour satisfaire à cette obligation?
Bien cordialement,
Mathilde Bourdat Il y a 5 années
@Camille Bodinier Merci de suivre le blog, et pardon pour le délai de réponse ! Non, le délai n’est pas repoussé, le premier bilan à 6 ans doit être fait au plus tard en mars 2020 pour les salariés déjà présents dans l’entreprise en mars 2014.
jean-pierre Willems Il y a 5 années
Bonjour Mathilde,
Je ne partage pas cette analyse qui me semble ne pas tenir compte du fait que l’article L. 6321-2 comporte deux critères : formation obligatoire conditionnant l’exercice d’une activité ou fonction. Tel n’est pas le cas des formations qui relèvent d’une obligation générale de formation. L’interprétation que vous retenez me paraît donc excessivement large. Je vous renvoie à mon analyse qui sera publiée cette semaine par Newstank.
A votre disposition pour échanger sur le sujet
Jean-Pierre Willems
Mathilde Bourdat Il y a 5 années
Bonjour Jean-Pierre
un grand merci de votre observation, je suis très heureuse de pouvoir échanger avec vous sur ce point. Effectivement, la nouvelle rédaction de L6321-2 CT réduit la portée de l’obligation de l’employeur. J’en suis très soulagée, car je voyais mal les entreprises satisfaire à une lecture extensive de la notion de formation obligatoire !
Merci encore
Mathilde
Mathilde Bourdat Il y a 5 années
@Jean-Pierre Wilhems : billet rectifié, encore merci 🙂 !
Safety Bus Il y a 6 années
Le chef d’établissement est responsable de la formation de ses salariés, il doit donc veiller à ce que ses collaborateurs suivent une formation en sécurité adaptée au poste de travail.
Le service pédagogique de Safety-bus http://www.safety-bus.com est à votre écoute pour adapter le contenu des formations à vos exigences ainsi qu’à votre environnement.
• Durée du programme,
• Nombres d’exercices pratiques,
• Création d’exercices spécifiques,
• Intégration de vos consignes de sécurité.
Fort de plus de 20 000 personnes formées chaque année, nous souhaitons proposer à nos clients une offre personnalisée et optimisée.
LE CLEZIO DELPHINE Il y a 6 années
Bonjour Mathilde
Merci pour cet éclairage tout à fait intéressant… et effrayant car tous les suivis réalisés depuis 2014 sont balayés et il reste moins de 2 ans pour se remettre au carré si je comprends ben.
Ce changement de règle du jeu en cours de cycle me rend perplexe.
Mathilde Bourdat Il y a 6 années
@Delphine Le Clezio Oui, cela interroge par rapport au principe de non-rétroactivité de la loi.
Virginia Il y a 6 années
Merci pour cet article très utile.
Mathilde Bourdat Il y a 6 années
🙂 !