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De nouveaux lieux pour apprendre

Mathilde BourdatManager Offre et Expertise Formation Cegos

    De nouveaux lieux apparaissent : fablab, living lab, learning labs … Tous, à un degré divers selon leur objet, mettent à disposition des moyens pour faire, coopérer, créer ensemble. Des universités d’entreprise reconfigurent leurs locaux en s’appuyant sur ces « espaces inspirants ». Dans ce premier billet sur ce sujet, je m’intéresse à l’évolution des représentations sous-jacentes à ces nouvelles configurations.

    La configuration de l’espace reflète une représentation de l’acte d’apprendre

    Je viens animer une formation en « intra », dans une entreprise. J’arrive dans la salle dédiée à cet effet. Vidéo projecteur pointé sur l’écran blanc, bureau du formateur face aux lourdes tables disposées en « U », ou même, quelquefois, rectangle fermé façon salle de réunion … Le décor est planté et induit une part importante de ce qui va se jouer lorsque les participants seront présents. La représentation implicitement exprimée est celle d’un centrage des regards sur le diaporama, de l’attention sur le formateur. La disposition « en U » facilite certes davantage les échanges inter-participants que celle en amphithéâtre ou en rangées, mais le centrage majeur reste sur le formateur « porteur du savoir ».

    La marge de manœuvre résidera dans la possibilité de déplacer les tables, de circuler autour, d’entrer dans le rectangle … Elle est parfois bien réduite …

    De nouvelles configurations s’inventent : mobilier flexible, cloisons mobiles, matériels manuels et équipements digitaux propices à la créativité , à la coopération, à l’engagement des participants … Il ne s’agit pas seulement d’équipement, mais bien de créer un « écosystème » favorable à l’intelligence collective, comme l’indique la « charte des learning labs » définie par l’Alliance Sciences§Business entre plusieurs grandes écoles : « Un LearningLab est un lieu et un écosystème d’expérimentation et d'innovation sur les nouvelles formes de travail et d'apprentissage collaboratif. Ces espaces collaboratifs innovants ont recours simultanément aux outils numériques, aux environnements, équipements, supports d’apprentissage et méthodes pédagogiques favorisant l’intelligence collective ». On peut voir ici la vidéo de présentation du « learning lab » de l’Université Catholique de Lille par Jean-Charles Cailliez.

    Les « medialab », « learninglab », « salles de codesign » et « espaces de coworking » de l’Université Catholique de Lille sont ainsi porteurs d’un bouleversement de la perspective pédagogique, du cours magistral vers la production de savoir par les groupes d’étudiants, accompagnés par leurs professeurs.

    Nouveaux lieux pour nouveaux apprentissages

    Il ne s’agit pas seulement d’apprendre différemment. Mais d’apprendre autre chose.

    Il me semble que l’émergence de nouveaux lieux pour apprendre, de même, concrétise le sentiment diffus que l’ancien modèle du « formateur transmetteur », quelles que soient sa qualité et la pertinence des exercices d’application proposés, ne suffit plus.

    Comme l’indique Diana G. Oblinger dans le e-book « Learning spaces » (Educause, 2006), « les apprenants d’aujourd’hui, qu’ils aient 18, 22 ou 55 ans, ont des attitudes des attentes et des contraintes différentes de celles d’il y a 10 ans ». Les contenus devenant accessibles sur l’intranet de l’entreprise, ou bien directement sur internet, le lieu dédié à l’apprentissage ne peut plus être focalisé sur la transmission de ce contenu. On peut ainsi parfaitement transposer à la formation professionnelle d’adultes ce qu’écrit P. Giorgini à propos de l’université (La transition fulgurante, Bayard, 2016. P 148) : « (…) si le processus d’acquisition de connaissances ou de formation peut être entièrement désynchronisé de l’impératif de présence conjointe des professeurs ou experts, voir du groupe formé, n’importe quelle situation opérationnelle (entreprise, etc) peut devenir apprenante tout au long de la vie ». Et, plus loin : « Face à un problème, les nouvelles générations cherchent à nouer des alliances, à se mettre en relation pour trouver collectivement des solutions. Le recours à une expertise ou à un mentor n’est plus la norme. Cette nouvelle donne interroge les politiques et les systèmes de formation en général ».

    Les problèmes à résoudre en situation réelle sont complexes, et sollicitent fréquemment de croiser différents enjeux et champs de connaissances. L’accélération des rythmes économiques et de la complexité requièrent des savoir-faire relatifs à la conduite « agile » des projets. La frontière entre « agir » et « apprendre » s’estompe. Tout ceci tend à passer de l’ère de la formation à celle de « l’apprendre ensemble », de la transmission de contenus de références et de prescrit à la résolution des problèmes par l’intelligence collective.

    Au-delà « d’apprendre autrement », il y a donc l’idée qu’il convient aujourd’hui « d’apprendre autre chose », et particulièrement de coopérer de manière transdisciplinaire pour résoudre les problèmes ensemble.

    « L’âge du faire » … et le retour de la conversation

    Je m’inspire ici bien sûr du titre du livre de Michel Lallement, qui enquête sur la façon dont les « hackers » de la Silicon Valley inventent une nouvelle manière de travailler, loin des hiérarchies traditionnelles. Et, au-delà, une nouvelle manière de vivre ensemble.

    Mais que peut signifier « l’âge du faire » en matière d’apprentissage, lorsqu’une large partie de la population active est « tertiarisée » et travaille à partir de données abstraites ? Les mots sont parfois impuissants à nous faire comprendre. Ils renvoient potentiellement à une représentation différente pour chacun d’entre nous. Passer par le faire, ce peut être, à l’aide de jeux de construction, de pâte à modeler, du dessin, de l’impression 3D… une autre façon, plus efficace de partager des représentations et d’en construire de communes. « Une solution aux limites du langage consiste à substituer l’image aux mots » écrit R. Sennet dans « Ce que sait la main » (A. Michel, 2010). Voir ici le lien que fait Denis Cristol entre les « Fablabs » et le « renouvellement de l’apprentissage ». Et se dire en regardant cet exemple de Lego Serious PlayTM que le faire permet quelques fois d’exprimer ce que l’on n’oserait pas dire …

    Les nouveaux espaces d’apprentissage prévoient donc souvent des matériels pour le « faire ». Ils réhabilitent aussi la conversation comme élément déterminant d’apprentissage entre pairs.

    « La conversation est la plus importante des technologies inventées pour apprendre » écrit Jay Cross dans « Transform Corporate learning for the Era of Collaboration ». « La véritable conversation mixe l’empathie, l’émotion, le langage corporel, la compréhension mutuelle, la nuance, et les normes culturelles. Les conversations sont les cellules souches de l’apprentissage. Améliorer la possibilité de converser, et la qualité de la conversation, et automatiquement vous améliorerez la quantité d’apprentissages » (la traduction est assurée par moi-même).

    Voir également dans l’article « Rethinking the Classroom : Spaces Designed for Active and Engaged Learning and Teaching » la « pyramide des apprentissages », fruit d’une recherche menée en 2005. Le taux de rétention va de 5% pour une intervention en mode conférence à 50% pour la discussion en groupe et 80% lorsque l’activité consiste à expliquer aux autres et mettre en oeuvre immédiatement.

    Les nouveaux lieux pour apprendre favorisent donc la conversation. Ainsi cette belle université du management d’un grand organisme de service public : il y a des salles, certes, mais les apprentissages sont aussi prévus pour advenir ailleurs, et tout l’espace est conçu comme « apprenant ». De petits groupes peuvent converser, confortablement installés. La lumière du jour entre à flot, et l’on se dit qu’il doit être bon d’échanger là.

    Faire et converser … C’est peut-être un peu de l’esprit des Lumières qui nous revient, qui plaçait « les tâches manuelles sur le même plan que les labeurs de l’esprit » (R.Sennet, pré-cité).

    Oui, bon, mais comment éviter que beaucoup de temps ne soit passé à « faire » sans que cela ne débouche vraiment sur des savoirs co-construits ? Et que la « conversation » ne soit plus proche de celle du café du commerce que du dialogue socratique ? Il apparaît immédiatement qu’il ne s’agit pas que d’une affaire d’aménagement, mais que tout le « système formation » se trouve transformé. A suivre …

    Ecrit par

    Mathilde Bourdat

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