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Réforme de la formation professionnelle : que devient l'imputabilité?

Mathilde BourdatManager Offre et Expertise Formation Cegos

La suppression de la contribution « 0,9 » prévue par l’ANI du 14/12/2013 et par le projet de loi relatif à la formation professionnelle, à l’emploi et à la démocratie sociale aura forcément un impact sur la définition même de la formation.

Que devient la notion d’imputabilité dans ce nouveau cadre juridique ?

réforme de la formation

La suppression du 0,9 n’est pas la suppression du plan de formation

Cela paraît évident, mais cela va mieux en le disant.
Même si, comme nous l’indiquions dans un billet précédent, le texte du projet de loi dans sa version actuelle vient jeter un flou sur l’étendue des obligations de l’employeur.

L’obligation d’adapter le salarié aux exigences de son poste de travail est réaffirmée. Les actions de développement des compétences réalisées dans le cadre du plan – y compris lorsque le compte personnel de formation est mobilisé - sont assorties de la reconnaissance des compétences acquises par le salarié.

La consultation du CE en matière de formation est renforcée.
Une « garantie » - dont on a dit cependant  la semaine dernière qu’elle est bien fragile, vient sanctionner le respect par l’employeur de ses obligations de contribuer à l’employabilité du salarié, via les entretiens professionnels, l’accès à la formation, et/ou d’autres mesures tendant à la progression professionnelle du salarié.

Le fait de s’acquitter de ses contributions formation ne suffira donc pas à exonérer l’employeur de son « obligation de faire » en matière de formation.
Mais une fois le 0,9% supprimé, la sempiternelle question de « l’imputabilité » se pose forcément différemment. Et la notion « d’action de formation » est à redéfinir.
Là encore, l’ANI du 14/12/2013 et le projet de loi proposent des lectures bien différentes.

L’action de formation vue par l’ANI et par le projet de loi

Très logiquement, passer d’une obligation de payer à une obligation de faire implique de réinterroger « ce que l’on appelle faire » .
Aujourd’hui, si l’employeur n’a pas versé sa contribution 0,9% à l’OPCA, il doit justifier qu’il a bien dépensé, à hauteur au moins de sa contribution minimale, des frais de formation relatifs à des actions « imputables ».

Et une action de formation est dite « imputable » lorsqu’elle répond aux critères suivants :

  • Elle se trouve dans le champ de la Formation professionnelle Continue. (L.6313-1 Code du Travail).
  • Elle répond à des critères précis (L6353-1 Code du travail) :

- Programme préétabli

- Objectifs déterminés,

- Moyens pédagogiques, techniques et d'encadrement

- Moyens permettant de suivre son exécution et d'en apprécier les résultats

  • Attestation mentionnant les objectifs, la nature et la durée de l'action et les résultats de l'évaluation des acquis de la formation délivrée aux participants à l’issue de la formation. (sur ce dernier alinéa, voir billet précédent L’évaluation des acquis est elle obligatoire)

La lecture de ces critères par l’Administration a été explicitée, pour la formation en ligne (« Formation Ouverte et à distance) par la circulaire de 2001, et pour l’ensemble des actions de formation par la circulaire de 2006.

Cependant, j’ai déjà eu l’occasion d’écrire dans ce blog, tout comme d’autres acteurs de la formation professionnelle, combien ces critères d’imputabilité sont un frein à l’innovation pédagogique et à l’efficacité même des actions.

C’est sans doute au vu du même constat que l’ANI (article 2) propose un élargissement de la définition de la notion de formation :

« Sans préjudice des obligations énoncées à l’article L 6321-1, le maintien des compétences et l’acquisition de compétences nouvelles, l’acquisition d’une qualification reconnue ou d’une habilitation nécessaire à l’exercice d’une activité peuvent résulter de la mise en oeuvre de séquences formelles ou non-formelles de formation.

Une formation formalisée se caractérise par :

  • la détermination d’objectifs préalables ;
  • une ingénierie de formation ;
  • la mise en oeuvre de moyens pédagogiques, techniques et d’encadrement ;
  • l’évaluation des acquis ou des résultats de la formation

Les modalités pédagogiques mobilisées peuvent être variées.
En fonction des besoins de la personne ou des contraintes de l’entreprise, la formation peut être continue ou séquencée, présentielle ou à distance, de durée variable et encadrée ou non par un formateur.
Sur la base de cet article notamment, un travail de définition de l’action de formation est mené avec les pouvoirs publics et devra déboucher avant la fin du premier semestre 2014 ».

Reconnaître que le développement des compétences peut résulter de « séquences formelles ou informelles de formation », donner toute sa place à l’ingénierie pédagogique comme critère à prendre en compte pour une séquence formelle de formation, indiquer que cette même action formelle peut être « encadrée ou non par un formateur » : ces propositions sont porteuses de dispositifs formation adaptés aux besoins spécifiques de chaque apprenant, diversifiés. Elles ouvrent la perspective de sortir de schémas de formation « calés sur la feuille de présence », selon l’expression récente de Sylvie Brunet, vice-présidente de l’ANDRH.

Une rédaction plus restrictive du projet de loi

Las ! Manifestement, les rédacteurs du projet de loi ne l’ont pas entendu de cette oreille. Dans la version actuelle du projet, L’article L. 6353-1 est  modifié (modifications en gras) :

« Les actions de formation professionnelle mentionnées à l'article L. 6313-1 sont réalisées conformément à un programme préétabli qui, en fonction d'objectifs déterminés, précise le niveau de connaissances préalables requis pour suivre la formation, les moyens pédagogiques, techniques et d'encadrement mis en oeuvre ainsi que les moyens permettant de suivre son exécution et d'en apprécier les résultats.

« La formation peut être continue ou non.
« Elle peut s’effectuer, en tout ou partie, à distance, le cas échéant en-dehors de la présence des personnes chargées de l’encadrement. Dans ce cas, le programme mentionné au premier alinéa précise :
« 1° la nature des travaux demandés au stagiaire, et le temps estimé pour les réaliser ;
« 2° les modalités de suivi et d’évaluation spécifiques aux séquences de formation ouverte ou à distance ;
« 3° les moyens d’organisation, d’accompagnement ou d’assistance, pédagogique et technique, mis à disposition du stagiaire. » ;
« Un décret précise les modalités d’application du présent article. »

Il n’est ici plus fait mention des séquences informelles. L’obligation de préciser les pré-requis vient se rajouter, alors que l’on sait que cette notion n’a pas toujours de pertinence pédagogique. Et enfin, les dispositions relatives aux formations se déroulant hors de « l’encadrement » du formateur ne font que reprendre les dispositions régissant actuellement la formation en ligne.

Aucune avancée donc, dans cette rédaction.

Dès lors, deux lectures du devenir de la notion d’imputabilité me semblent possibles

1° Réserver les « critères d’imputabilité » à la justification des dépenses faisant l'objet d'une demande de refinancement sur fonds mutualisés

Une contribution subsiste au titre du « plan » pour les entreprises de moins de 10 salariés (0,4%), pour les entreprises de 10 à 49 salariés (0,2%), pour les entreprises de 50 à 300 salariés (0,1%).
Cette contribution est désormais obligatoirement versée à l’OPCA. Et d’autres refinancements restent possibles pour des dépenses engagées au titre de la professionnalisation ou du CPF.

Ne pourront donner lieu au refinancement de  l’OPCA que des dépenses réalisées pour des actions réunissant les critères finalement exigés par la loi – et selon la lecture qu’en aura chaque OPCA…
Mais toutes les autres actions – pour lesquelles aucun refinancement OPCA ne sera plus demandé – pourraient, dans cette lecture, s’affranchir des critères d’imputabilité.

2° Considérer que l’employeur ne remplit son « obligation de former » qu’au moyen d’actions de formation « imputables »

C’est devant les Prud’hommes, souvent après un licenciement pour motif individuel ou pour motif économique, que se pose la question du respect par l’employeur de son obligation « d’adapter les salariés aux exigences de son poste de travail » et –du moins tant que l’alinéa 2 de L 6321-1 n’est pas supprimé – de veiller à son maintien dans l’emploi ou à sa capacité à occuper un emploi.

Et là, qu’est ce que le juge regardera ?
Prendra t’il en compte les tutorats, les formations entre pairs, les « situations apprenantes »,  l’accès à des ressources en ligne, qui auront pu être « tracées » sur les compte rendus d’entretien professionnel ?
Ou bien seulement les formations répondant aux « critères d’imputabilité » ?

Charles Jennings a posé le principe selon lequel 70% des apprentissages se réalisent en situation de travail, 20% grâce aux échanges entre pairs, et 10% seulement via des temps de formation formels. Une lecture plus ouverte de la façon dont l’employeur peut contribuer au maintien ou au développement des compétences pourrait sans doute permettre à beaucoup plus de salariés d’apprendre tout au long de leur vie professionnelle.

Ecrit par

Mathilde Bourdat

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