Former aux compétences d’aujourd’hui

Par le 17 novembre 2013

Le discours sur la réforme valorise le rôle de la formation professionnelle. Plus justement répartie, mieux allouée vers les publics les plus en difficultés, elle serait un outil majeur de lutte contre le chômage et de « sécurisation de l’emploi » pour ceux qui en ont un.

Oui, mais former à quoi et comment ?

Nuage de mots 2

Le croisement de  deux billets sur le sujet : « Trois compétences professionnelles qui font la différence entre les XX et le XXIème siècle » et « Les 7 compétences clés du travail de demain », me permet de retenir pour le propos d’aujourd’hui  les compétences clés suivantes :

1 – Rechercher, sélectionner, évaluer, interpréter, communiquer des informations pertinentes

  • Maîtriser l’usage de réseaux sociaux, d’outils de curation, de production de contenu
  • Maîtriser une méthodologie de recherche/ validation d’information
  • Partager l’information sur les réseaux sociaux

2 – Travailler en équipe et en réseau, collaborer à distance

  • Coopérer avec des personnes d’autres équipes
  • Avoir des connaissances dans plusieurs disciplines
  • Comprendre la logique, le langage de l’autre
  • Utiliser des médias sociaux, un environnement de travail virtuel, pour coopérer à distance

3 – Etre agile, s’adapter

  • Accepter la nouveauté, le changement, l’incertitude
  • Expérimenter, prendre des risques

4 – Etre créatif, innover

  • Etre ouvert aux nouvelles formes d’idées et d’expériences
  • Maîtriser des outils de la créativité (questionnement, expérimentation, représentations visuelles…)

5 – Apprendre de façon autonome

  • Se connaître en tant qu’apprenant, trouver les stratégies efficaces pour soi-même
  • Se définir des projets d’apprentissage
  • Utiliser toute situation pour apprendre
  • Réfléchir sur ses pratiques, les confronter avec d’autres
  • Maîtriser des outils du web permettant d’organiser son espace personnel d’apprentissage

Ces compétences, y compris les compétences digitales, ne sont pas que « pour les cadres » ou « pour les jeunes », comme me disait récemment une participante ! Elles sont nécessaires dès aujourd’hui pour saisir les opportunités, concrétiser ses projets, rebondir après une perte d’emploi ou un échec. Elles sont aussi nécessaires que la maîtrise des compétences en numéracie ou en littéracie, pour lesquelles l’OCDE a porté récemment un diagnostic inquiétant sur les adultes de notre pays.

Qui est responsable du développement des compétences ?

D’un côté il y a l’entreprise, et la jurisprudence que l’on connaît sur l’obligation de veiller au maintien dans l’emploi et au maintien de l’emploi – l’abandon de la contribution obligatoire « 0,9% », s’il se concrétise, ne diminuera en rien cette obligation. Mais elle ne suffit pas – la preuve en est la focalisation de nombreux plans de formation sur l’adaptation et les formations obligatoires.

Se limiter à l’adaptation aux exigences « du poste d’aujourd’hui »  entraîne l’impasse sur l’acquisition des ressources nécessaires à l’employabilité de demain – la « suradaptation » n’est pas une solution viable dans un monde en mouvement accéléré. Et cantonner l’accès de la grande majorité des salariés à l’accès à des formations « prescrites », voire « obligatoires », ne développe pas leur capacité à auto-gérer leurs apprentissages.

Côté salarié, le principe du compte personnel de formation –comme celui du DIF en son temps !- est justement de « le rendre acteur de son projet », de lui redonner une capacité d’auto-détermination.

Ce n’est pas un dispositif seul qui peut changer la donne. Et ce qui me paraît le plus inquiétant, dans certains comportements que je constate aujourd’hui, est le manque d’auto-direction des apprentissages : déficit  d’engagement personnel, difficulté d’auto-organiser ses apprentissages, et manque critique de compétences digitales.

Il y a une « co-responsabilité » à trouver, et bien sûr le curseur marquant le degré de répartition de cette responsabilité ne sera pas positionné de la même manière pour un cadre bien formé que pour un salarié peu qualifié.

Côté entreprise, cela ne signifie pas seulement « faire un plan de formation », mais surtout se demander « en quoi puis je aider chaque salarié à acquérir les compétences nécessaires à chacun dans le monde d’aujourd’hui », même si elles ne sont pas mobilisées dans le poste de travail actuel.

Pour reprendre l’expression de Denis Cristol, il s’agit de créer un « écosystème d’apprentissage ».

Cet écosystème est à plusieurs niveaux, qui s’interpénètrent et se fertilisent les uns les autres :

  • L’apprenant,
  • La conception pédagogique,
  • La politique et l’offre de formation de l’entreprise,
  • Les « systèmes » qui permettent –ou non – à cette entreprise d’être apprenante : management, organisation du travail, système d’information…
  • La société dans son ensemble, avec son système de formation initiale et continue, son offre culturelle, ses rapports sociaux…

5 écosystèmes interconnectés

Regardons les deux niveaux « politique formation » et « conception pédagogique », dans le cadre de l’entreprise.

Politique et offre de formation

Ce niveau englobe les orientations formation, les grands choix en matière de mise à disposition de l’offre, de modalités… La question est donc « en quoi l’offre de formation de l’entreprise crée t-elle un environnement favorable au développement de ces compétences transversales clé d’aujourd’hui ? »

Ecosystème politique

Niveau conception pédagogique

Ce niveau comprend les situations d’apprentissage auxquelles les salariés sont confrontés : ces situations facilitent-elles le développement des compétences transversales clé d’aujourd’hui ?

Ecosystème conception

Pour alimenter vos pratiques en matière de pédagogie active, un guide très précieux.

La responsabilité du salarié restera celle de se saisir, avec plus ou moins d’accompagnement, des opportunités offertes par cet écosystème.

Que ce soit dans l’entreprise ou dans la société dans son ensemble, il me semble que la  réflexion sur l’accès à la formation ne peut évacuer celles des compétences que l’on veut développer, et du  « comment ».
C’est pourquoi tant de discours actuels sur la formation me paraissent relever davantage d’une « pensée magique et incantatoire » que d’une véritable contribution à des systèmes efficaces.

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