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Quel rôle pour le groupe en formation à distance ?

Par le 28 janvier 2009

Le groupe joue -t’il un rôle dans les apprentissages ?

L’approche constructiviste a montré, en particulier avec Vygotski,  l’importance du rôle du groupe dans les apprentissages de chacun de ses membres. Cette approche s’intéresse à la façon dont l’individu construit ses connaissances. Elle nous montre que l’apprentissage efficace repose sur des éléments clés, parmi lesquels :

  • L’apprenant doit s’engager activement dans des résolutions de problèmes – au plus proche de problèmes réels.
  • L’assimilation des savoirs nouveaux se fait à partir des représentations mentales antérieures, ce qui peut demander un pénible travail de déconstruction – reconstruction.

Cette assimilation est grandement facilitée par les interactions  sein du groupe de pairs. Grâce à ces interactions, en effet l’apprenant peut :

  • Prendre conscience de ses propres représentations – et de ce qu’elles ne sont pas « universelles »,
  • Prendre conscience du fait que ses représentations initiales ne sont pas adaptées pour résoudre le problème
  • Accepter de quitter ses représentations initiales, de transformer son schéma mental, pour en adopter un autre plus pertinent au regard du problème à résoudre.

C’est là que le groupe prend tout son rôle : les interactions entre pairs sont plus efficaces que l’écoute d’une personne investie d’une autorité (formateur, manager…).

Avec une personne investie d’une autorité, j’écoute, j’acquiesce… et je risque bien de retourner à mes convictions antérieures si le changement est « coûteux »- en effort, en perte de certitude…

Avec mes pairs, j’entre dans la discussion, je cherche à maintenir le lien social, je teste la pertinence des propositions des uns et des autres,  et par là même je remets en cause mes représentations précédentes. Le processus d’apprentissage n’est complet que s’il y a prise de conscience et réinvestissement de ces apprentissages.

D’où le bel aphorisme de Philippe Carré: « on apprend toujours seul, mais jamais sans les autres ». Seul l’individu construit ses connaissances, mais les interactions sociales, quelque soit la forme sous laquelle elles sont médiatisées, sont un puissant moteur de l’apprentissage.

Et la formation à distance ?

Qu’en est il, dès lors, de la formation à distance ? Longtemps, ce vocable a renvoyé l’ imaginaire à « l’apprentissage assisté par ordinateur » : un apprenant isolé devant un micro ordinateur. N’y a t’il pas là un risque de perte du lien social si précieux aux apprentissages ?

Là encore, tout est question de pédagogie, et non de technique

C’est au concepteur du dispositif de veiller à ce que les conditions d’un apprentissage optimal soient réunies, en intégrant le groupe comme un élément en soi du système.

Ce schéma, repris de Faeber (2002) me semble bien illustrer les questionnements et interactions à prendre en compte dans l’élaboration de tout dispositif:

Comment apprend on en e-learning2

La question n’est plus seulement de compenser le risque de perte de lien social, mais de mettre à profit les possibilités offertes par la technologie pour faire vivre le lien social – en temps que vecteur d’apprentissage.

Pour cela, différents leviers seront utilisés : le tutorat, mais aussi les outils du « web 2.0« .

Le tutorat

L’article de Catherine Roupié dans la revue Tutorale publiée par T@d http://www.tutoratadistance.fr/tad/ sous la direction de Jacques Rodet, « Tutorat et lien social dans un dispositif de formation hybride », fait un point très complet et étayé sur le rôle essentiel du tuteur dans les dispositifs de formation à distance : c’est lui qui devient le « faiseur de lien social », et qui « engage les apprenants dans des activités collaboratives tutorées » (Catherine Roupié).

Aux individus, il apporte « soutien et motivation, (fait) acquérir des méthodologies de travail » (CR)… Mais il doit aussi « développer, chez les participants, le sentiment d’appartenance à une communauté d’apprenants ». Et, ajoute Catherine Roupié, « la communauté peut se construire entièrement à distance sans que les participants ne se rencontrent jamais en face à face ». C’est le dispositif pédagogique qu’il faut travailler : « il ne saurait y avoir de communauté d’apprentissage sans une volonté commune qui va s’incarner à travers l’objet d’apprentissage »(CR).

Blogs, wikis, podcasts, videocasts… téléphone et e-mails!

Ce ne sont que des moyens, supplémentaires ou déjà anciens, au service des apprentissages.

Dans « Learning solutions – Best of the eLearning Guilds » (Pfeiffer 2008), Joyce Seitzinger, au sein de l’article « Be constructive – Blogs, podcasts and wikis as constructivist learning tools » (Soyez constructif – Blogs, podcasts et wikis comme outils d’apprentissage « constructiviste »), cite de multiples usages :

  • Tenir son « blog d’apprenant » – réagir sur celui des autres membres du groupe. Prendre ainsi conscience des difficultés rencontrées par les autres, partager leurs expérimentations, leurs succès…
  • Créer le « blog du groupe », chaque membre devient un auteur sur un blog partagé. Les participants disent combien le blog est important pour créer la « communauté d’apprenant ».
  • Rechercher les autres blogs traitant des mêmes sujets, créer des liens.
  • Diviser le groupe en sous groupes : chacun crée un blog sur un sujet et poste des commentaires sur les blogs des autres.
  • Utiliser les commentaires comme un moyen d’obtenir du feed back, d’argumenter.
  • Utiliser le podcast/video cast  pour amener les apprenants à interviewer des experts, mettre en ligne une présentation réalisée par les apprenants…
  • Utiliser le wiki pour permettre au groupe de capitaliser les connaissances qu’il construit…

Les usages sont innombrables. J’ajouterai les potentialités immenses de la « classe virtuelle » ou « webconf », pour le tutorat, pour un retour d’expérience, pour une formation synchrone à distance, mais aussi, en outil auto-géré par les participants, pour le travail collaboratif à distance…

Pour un partage de pratiques en français, on se référera utilement au site Apprendre 2.0, ou encore au passionnant dossier réalisé par CA Bachand sur le site Profweb.

En 1998, Michel Serres a publié dans le Monde de l’Education un article intitulé « La société pédagogique ». « Les contenus dépendent des canaux » écrit – il, et « les collectifs dépendent encore des canaux ».
Le savoir lui même, les relations des apprenants au savoir, à ceux qui le transmettent, et leurs relations entre eux, ne sont pas indépendants des voies d’accès au savoir.
De nouveaux canaux sont à notre portée. Nous avons beaucoup à inventer.

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Martin Legault Il y a 9 années

Article très intéressant qui met de l’avant une composante essentielle de la formation à distance. L’interactivité, responsabilise, enrichit, stimule incontestablement l’expérience d’apprentissage des étudiants. Merci!

Répondre
    Mathilde Bourdat

    Mathilde Bourdat Il y a 9 années

    @ Martin Legault Merci de votre retour très encourageant !

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